La laque y abonde tout autant que les incrustations de nacre ou d’écaille et les marqueteries. Un mobilier somptueux et polychrome, à l’ornementation exubérante. Du point de vue politique, le second empire a duré de 1852 à 1870. Cette période correspond aussi à la révolution industrielle en France et à l’émergence d’une bourgeoisie qui aspire à montrer sa réussite. Il correspond au style victorien du royaume britannique et de ses colonies. C’est un règne de faste et de consommation (on dépense enfin après avoir économisé sous Louis-philippe). Le rôle de l’impératrice Eugénie y est presque aussi important dans le domaine artistique que celui de son mari.
Curieusement, ce que l’on nomme ”style Napoléon III” est plutôt caractérisé par une…absence de style. Il n’y a rien ni dans les matériaux qu’il emploie, si dans les formes qu’il reproduit, ni dans l’ornementations qu’il utilise qui lui soit véritablement propre; tout chez lui, au contraire, est emprunté aux styles qui l’ont précédé. La laque y abonde tout autant que les incrustations de nacre ou d’écaille et les marqueteries.
Un mobilier somptueux et polychrome
Les ébénistes, les tapissiers et les décorateurs du Second Empire ont puisé indistinctement, avec exubérance, à toutes les sources. Durant les dix-huit années que dure le règne de Napoléon III, le Gothique, le Renaissance, le Louis XV, le Louis XVI, le Regency, l’art chinois et l’art japonais sont à la mode, non pas successivement, mais presque simultanément. Ce qui est typique du style Second Empire est la somptuosité et la polychromie. On aime la richesse qui se voit. C’est l’art du clinquant. On ne se soucie pas de la véracité de la copie, il n’y a pas d’imitation pure et simple. On ne retient que le plus ostentatoire et le plus éclatant.
Quand le faux Louis XVI devient vrai Louis-Impératrice
Le second empire c’est voit aussi la naissance des premiers ”grands magasins”, les tous premiers ensembliers comme les magasins du Printemps préparent leurs copies d’entrée de gamme. On crée de faux meubles Boulle richement incrustés de nacre et d’écaille. Les copies des petits meubles Louis XV aux lignes extravagantes et aux bronzes clinquants remplissent les salons. L’Impératrice Eugénie, admiratrice éperdue de Marie-Antoinette, fait ressortir du mobilier national un grand nombre de meubles ayant appartenu à la femme de Louis XVI, les fait copier dans un pastiche pur et simple du Louis XVI (surtout des meubles de Riesener ou d’Oeben) pour les placer dans différentes résidences. Elle aime la dorure et pour lui plaire on alourdit les meubles de bronze, on puise dans les motifs des décorateurs du temps, surtout Delafosse, on y ajoute beaucoup de nœuds, d’oves, de colombes, de lis naturels.
Par ailleurs, Eugénie de Montijo aimait les arts asiatiques. En 1867, elle fait refaire des pièces au Château de Fontainebleau pour montrer sa collection personnelle d’art asiatique, qui comprenait des cadeaux donnés à l’empereur par une délégation envoyée par le roi de Siam en 1861, et d’autres objets pris lors du pillage de l’Ancien Palais d’Été à Pékin par une expédition militaire franco-britannique en 1860. Cette collection est toujours présentée à Fontainebleau.
La prolifération des formes, l’imitation permanente des styles précédents, la création incessante de petits meubles aux usages nouveaux rendent impossible en recensement complet du mobilier de cette époque. Le siège capitonné et abondamment recouvert de tissus sur toute sa surface se généralise avec le crapaud, le pouf, la borne, le confident ou l’indiscret. On invente la table gigogne et le guéridon à plateau basculant. Les copies de médailliers, buffets et autres meubles luxueux sont laqués de noir puis agrémentés de bronzes généreux et de filets dorés.
L’industrialisation du papier mâché
Les montants de certains sièges imitent le bambou, d’autres sont en papier mâché peint et décoré. Ce matériau , mis à la mode par les Anglais au début du siècle, est fabriqué en France à partir de 1850. C’est un composé de pâte à papier et de colle forte. Il n’est ni taillé, ni découpé mais moulé : c’est le début de la fabrication en série du mobilier. Souvent incrusté de nacre, il est utilisé pour les sièges, les guéridons et quelques petits meubles. Sa fragilité explique sa rareté de nos jours.
Le papier mâché existait depuis déjà fort longtemps en Orient, apparemment depuis le 8e siècle. Les chinois l’utilisaient pour mouler, par exemple, des casques de guerriers recouverts de laque. Ce n’est qu’au 16e siècle qu’ils commencèrent à être exportés en Europe par des marchants Portugais puis par des Hollandais. Les Anglais étaient friands de ce genre de marchandise qu’ils rapportaient dans leur pays. Mais c’était la laque, recouvrant l’objet en papier mâché et lui donnant un poli parfait qui suscitait le plus d’intérêt des Européens.
Le papier mâché fut utilisé artisanalement et industriellement pour la fabrication d’objets d’art et de meubles. En 1788, Charles Ducrest obtint même un brevet destiné à la réalisation de maisons, bateaux et véhicules variés confectionnés à partir de ce seul matériaux ou avec une base métalliques ou âme de bois.